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[Avignon 2019] Charlotte Matzneff pour "Arlequin, serviteur de deux maîtres" et "La Famille Ortiz"

Dernière mise à jour : 3 mai 2020

Les créations du "Grenier de Babouchka", la compagnie dirigée par Jean-Philippe Daguerre et Charlotte Matzneff, sont toujours très attendues. Charlotte Matzneff nous parle ici de sa mise en scène de "Arlequin, serviteur de deux maîtres" de l'inventif et truculent Carlo Goldoni (création à Avignon) et de son rôle dans "La Famille Ortiz", la nouvelle pièce de Jean-Philippe (presque création). Bienvenue au coeur d'extraordinaires aventures théâtrales auxquelles on souhaite autant de succès qu'à "Adieu Monsieur Haffmann" - dont nous avions parlé avec l'heureux lauréat au lendemain de l'inoubliable cérémonie des Molières: ici.


Bonne lecture et Vive le Théâtre!


Photo: Grégoire Matzneff (c)

Bonjour Charlotte. On est à la veille des générales à Avignon, non ?


Bonjour Philippe. Il y a des pré-générales au théâtre Actuel, mais tous les théâtres n'en font pas forcément... Pour d'autres, ça sera la générale demain...


Comment vous sentez-vous avant 3 semaines de 24/24 ? Le Grenier a combien de pièces cette année à Avignon ?


Oui, c'est un vrai marathon qui s'annonce là. En production totale, on a juste Goldoni "Arlequin, serviteur de deux maîtres" (12h, Théâtre du Roi René), que je mets en scène. Après, on est en co-production sur "Adieu Monsieur Haffmann" (10h10, Théâtre du Roi René), "Les mauvaises filles" (15h30, Théâtre Actuel) d'Aurélie Bargème et également sur "La Famille Ortiz" (17h15, Théâtre Actuel), la deuxième pièce de Jean-Philippe...

Parlez-nous du Goldoni s'il vous plaît?

Photo: Grégoire Matzneff (c)

C'est une superbe pièce. En fait, j'ai vécu 4 ans en Italie, et Goldoni est un auteur que j'adore. Je l'ai aussi beaucoup apprécié dans mon école de théâtre, l'école Claude Mathieu. On nous a fait découvrir ses pièces superbement écrites, très enlevées, dynamiques. C'est vraiment le théâtre que j'aime en fait et dans la lignée de ce qu'on défend avec le Grenier de Babouchka: le théâtre de tréteaux. C'est la première fois qu'on fait un auteur étranger et, comme j'ai vécu en Italie, je suis bilingue, j'ai pu traduire. Jean-Philippe a fait l'adaptation. On a transposé l'histoire dans l'Italie des années 20. Au départ de la pièce, il y a quelque chose de particulier, admis par tout le monde comme si c'était tout à fait naturel: il y a eu un meurtre, on est à la recherche du meurtrier et tout le monde pense que c'est le futur mari de la belle qui en est l'auteur. C'est le postulat de départ. Tout le monde a l'air de trouver normal de tuer... En partant de ce postulat, je me suis dit qu'il serait intéressant de mettre ça au moment où on a vraiment vu l'émergence de la mafia, c'est aussi l'émergence du jazz. Goldoni, est un auteur un peu comme Beaumarchais: on sent poindre la révolution culturelle des mœurs des serviteurs sur les maîtres, ils deviennent de plus en plus insolents, de la place de la femme aussi. Ca correspond parfaitement à ce qui se passe dans les 20's: avec la guerre des 14-18, les femmes ont commencé à travailler et l'adaptation marche très très bien. Et puis, du coup l'esthétique des 20's: les costumes faits par Alain Blanchot sont magnifiques, la musique de Aldo Gilbert entre le jazz, le jazz manouche c'est hyper festif.


Les pièces de Goldoni font le bonheur des comédiens: on peut vraiment s'amuser en les jouant!

Oui. Goldoni écrivait plus des canevas en fait, on est vraiment dans de la Comedia. Je ne l'ai pas monté dans cet esprit, mais j'en ai gardé certains principes, comme les apartés publics, qui ramènent à un jeu très ludique. Et puis, c'est vrai que tous les personnages de la Comedia: Arlequin, Pantalone, le Docteur... sont des personnages hauts en couleurs. En tant que comédiens, je pense que c'est assez jouissif. Je crois que les comédiens s'éclatent, mais il faudra leur demander directement...


Et la metteuse en scène ?


Je me suis régalée. Vraiment, c'est à dire que là j'en suis à un stade de ma vie où je sens qu'il faut que j'aille vraiment vers la mise en scène. C'est quelque chose qui m'amuse énormément.


C'est une création ?


C'est une création pour Avignon !


On va aussi parler d'une autre pièce, dont c'est la presque création, c'est la nouvelle pièce de Jean-Philippe Daguerre, "La Famille Ortiz", dans laquelle cette fois vous jouez.


Je joue le rôle de Claire, la fiancée de Pierre. Elle est enceinte... C'est très compliqué de parler de la pièce sans la dévoiler trop. On va dire qu'il y a un secret et que, au début de la pièce, Claire, mon personnage, se rend compte que son mari lui a menti. A partir de là vont s'enchaîner tout un tas de révélations.


C'est une pièce qui est dense.


C'est une pièce qui est très dense. Elle a un univers très riche et les comédiens que Jean-Philippe a choisis sont très physiques. C'est donc vraiment un théâtre très incarné avec un vrai univers visuel, musical. L'histoire... La manière dont c'est raconté tout ça fait que c'est très riche. Visuellement, c'est superbe! Je ne suis évidemment pas très objective mais je trouve ça très beau. Et puis, émotionnellement, elle est très forte.


Les personnages ont tous de vraies histoires, de vrais sentiments à mettre sur la table. Ce sont des tripes qui explosent on va dire.


C'est ça. Et en même temps, avec le côté un peu décalé que Jean-Philippe aime bien amener, comme dans la vie. On rit, on pleure, en une fraction de seconde, on change de sentiment. Ca n'est pas manichéen. Il n'y a pas de méchant, pas de bon... Tout est dans la demie teinte.


Et la première s'est très bien passée d'après ce que j'ai lu...


La première s'est extrêmement bien passée. On en a fait une deuxième à Rueil. Et on va s'apprêter pour la 3ème fois et toutes les autres à Avignon.


Vous avez fait des ajustements, changé des petites choses ?


A chaque fois on a changé des choses. On n'a pas non plus révolutionné la pièce, mais on a changé des musiques, on a coupé certaines choses, on en a rajouté d'autres. On a re-répété entre chaque représentation. Et on a nouveau répété avant Avignon, donc il y a encore des choses qui ont bougé.


Il s'est passé la même chose sur "Adieu Monsieur Haffmann". Jean-Philippe et vous, toute l'équipe, l'avez à chaque fois retravaillée, pour toujours aller à l'essentiel de chaque scène de chaque réplique. Vous essayez toujours d'améliorer.


Photo: Grégoire Matzneff (c)

C'est ce qui est un peu frustrant quand on fait une création à Avignon: comme tout s'enchaîne très vite, une fois qu'on a démarré, c'est compliqué de répéter entre les représentations. Le théâtre est pris toute la journée et il n'y a pas beaucoup d'autres possibilités que de solliciter les comédiens entre minuit et 6h du matin! Sur Monsieur Haffmann, la première année, comme on avait vraiment fait la création - on avait joué une fois à Montoire sur le Loire et après on avait joué directement à Avignon. Jean-Philippe avait voulu changer des choses, du coup on se retrouvait à minuit pour répéter. Mais c'est normal, il faut être exigeant. Si on sent que quelque chose ne va pas, il est difficile de continuer à jouer pendant 3 semaines sans rien changer. C'est l'art du spectacle vivant. On peut tester des choses même à la 300ème.


Vous disiez que vous vouliez de plus en plus aller vers la mise en scène...


Oui. Jusqu'à présent, j'avais peur et j'ai pris énormément de plaisir à mettre en scène mes jeunes comédiens pour leur spectacle de fin d'année, sans enjeu. J'étais leur prof de théâtre. Alors, j'ai eu envie de me lancer d'essayer sur "Le médecin malgré" l'année dernière au Théâtre Actuel. On a eu vraiment un joli succès, les gens sortaient ravis. Comme je suis russe, je l'avais transposé en Russie et là, grâce à mon expérience en Italie, j'avais envie de m'attaquer à cette culture. On va voir ce que ça va donner auprès du public mais en tous cas en répétitions, on s'est beaucoup amusé. Mon prochain projet, ce sera l'adaptation des « 3 mousquetaires » pour Avignon l'année prochaine.


Un mot de conclusion?


Je pense que j'ai beaucoup de chance. Je vais sortir complètement épuisée de cet Avignon, mais j'ai beaucoup de chance de travailler sur d'aussi beaux projets avec autant de belles personnes qui m'entourent, me soutiennent, me donnent la pêche. Oui. J'ai beaucoup de chance.


Propos recueillis par #PG9




10h10, Théâtre du Roi René: "Adieu Monsieur Haffmann"


12h, Théâtre du Roi René: "Arlequin, serviteur de deux maîtres" https://www.legrenierdebabouchka.fr/arlequin-serviteur-de-deux-maitres/


15h30, Théâtre Actuel: "Les mauvaises filles"


17h15, Théâtre Actuel: "La famille Ortiz"


Bon festival à toutes et à tous...




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